Un état des lieux – Chapitre I

On trouvera ici des essais de provenances diverses, écrits en ce vingt-et-unième siècle, et tentant d’éclairer les vestiges de société qui composent notre monde contemporain asservi par la logique marchande. On comprendra que cette liste n’est pas faite pour plaire à ceux qui veulent continuer à diriger ce monde là et à leurs serviteurs. Ni même à ceux qui, par opportunisme, préfèrent s’en satisfaire et parler d’autre chose.. Ou s’enfoncer dans le déni de réalité.

Ne seront pas recherchés ici les chefs-d’œuvre ni des ouvrages incontestables – d’ailleurs il n’y en a pas. Tenter d’éclairer honnêtement notre monde est devenu chose incertaine et inconfortable du fait même de ce que chacun doit faire comme efforts pour y vivre avec un minimum de cohérence et parfois simplement pour respirer…

Le capitalisme va finir; la question qui se pose c’est, va t’il nous entraîner dans sa fin avant que nous trouvions les moyens de nous en débarrasser.

Pour ceux qui ne comprendraient pas très bien ce qu’est le capitalisme, le libéralisme marchand, il est possible de résumer. Il est cette machinerie idéologique, cette pauvre religion, qui, ramenant tout à l’économie politique, est en train de transformer toutes choses en marchandise, absolument tout. Pour faire de l’argent.

Par ce mouvement, il anéantit progressivement tout champ commun et en finalité toutes possibilités d’un faire société. Ce sont aussi les conditions d’une vie humaine décente sur cette Terre qu’il est en train de ruiner totalement par son avidité et ses déprédations multiples.

Le capitalisme est un terrorisme global, à l’échelle de notre planète.

Il est toutefois grandement souhaitable de chercher à approfondir la question pour qui veut s’en saisir.

– « De la misère humaine en milieu publicitaire » de Groupe Marcuse .

De manière directe, la publicité ment régulièrement sur l’origine et la qualité des marchandises qu’elle nous vante. Que l’on pense à tous ces spots présentant les produits industriels comme issus du terroir. On nous montre le bon vieil artisan, non l’usine dont les produits sortent en réalité. On peut d’ailleurs y voir une sorte d’hommage que l’industrie inhumaine rend en permanence à ce qu’elle a supprimé – cet hommage ayant bien sûr fonction d’occulter la réalité industrielle, et de favoriser son développement au détriment de la production à échelle humaine.

– « Avis aux naufragés » de Robert Kurz .

Quand la raison critique se tait, c’est la haine meurtrière qui prend sa place. Alors, le caractère objectivement intenable du mode de production et du mode de vie dominants se traduit dès lors d’une façon non plus rationnelle mais irrationnelle. C’est ainsi que le recul de la théorie critique fut suivi par l’avancée du fondamentalisme religieux et ethno-raciste. Tant que la critique du capitalisme (sous sa forme radicale et émancipatrice) ne renaîtra pas, les accès de paranoïa sociale et idéologique seront la seule et unique aune permettant de mesurer le degré atteint par les contradictions de la société mondiale.

– « Qu’est-ce qu’un dispositif ? » de Giorgio Agamben .

J’appelle dispositif tout ce qui a, d’une manière ou d’une autre, la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler, de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants.

– « Pourquoi êtes-vous pauvres ? » de William T. Vollmann .

Le mérite principal de ce livre est de se confronter à une réalité honteuse que les populations des contrées « riches » préfèrent largement ignorer . Le système capitaliste n’a nullement remédié à cela et ne prétend même plus pouvoir le faire; il se contente d’organiser son invisibilité.

Plus de deux milliards et demi de personnes dans le monde vivent dans une grande misère et dans des conditions de vie parfaitement indignes.

Et cela, contrairement aux affirmations des « bonnes âmes » libérales, ne s’améliore nullement mais s’accompagne au contraire d’une sorte d’acceptation passive, d’un autisme social s’accommodant sans grande honte de l’infamie…

Ah, excuses-moi, j’ai une notification sur mon smartphone !

– « La perversion ordinaire » de Jean-Pierre Lebrun .

L’absence de rencontre avec l’autre, son évitement répété, ne peut que laisser intacte la toute-puissance infantile du sujet.

C’est ici que peut dès lors émerger ce que nous appellerons le « démocratisme ». C’est une illusion d’optique qui laisse croire au citoyen de la modernité démocratique accomplie que son autonomie est un donné d’emblée. Mais l’illusion fonctionne et il n’a de cesse que de vouloir se faire reconnaître dans sa singularité par un collectif à qui il estime ne plus rien devoir.

La vie psychique des néo-sujets de la modernité, en ces temps actuels où la force organisatrice et répressive du patriarcat n’est plus opérante, possède des caractéristiques qui la distinguent profondément de celles de leurs aînés. L’essentiel : ce n’est plus tant chez eux le refoulement qui est à l’œuvre, comme c’était le cas chez le « névrosé normal » auquel on était habitué, mais plutôt le déni ou le démenti.

– « Paradis infernaux, les villes hallucinées du néo-capitalisme » de D. B. Monk et Mike Davis

Série d’études urbaines saisissantes sur Le Caire, Pékin, Johannesburg, Dubaï, Kaboul, Managua, etc., Paradis infernaux pourrait être l’anti-guide des  » mondes de rêve  » engendrés par le capitalisme contemporain. De la désormais classique gated community de l’Arizona aux camps retranchés de Kaboul, en passant par la Californie de synthèse importée à Hong-Kong et ailleurs, ou par la spectacularisation architecturale de Pékin à l’ère néolibérale, l’imaginaire qui préside à ces nouvelles formes d’utopie est celui de l’enrichissement sans limites, de l’hyperbole constante, des dépenses somptuaires, de la sécurité physique absolue, de la disparition de l’Etat comme de tout espace public, de l’affranchissement intégral des liens sociaux préexistants… Mais cette débauche réservée aux riches ne donne lieu à aucune expérience réelle ; elle est tout entière branchée sur les objet-fétiches de la fantasmagorie mondiale, harnachée aux mêmes idéaux figés du marché global. L’absence d’horizon qui caractérise notre monde se redouble, dans ces outremondes, d’une violence faite aux pauvres, massés, toujours plus nombreux, derrière les frontières visibles ou invisibles qui chaque jour transforment un peu plus le territoire des riches en autant de citadelles néo-libérales enclavées au cœur de notre modernité.

– « La Vie sur terre » de Baudouin de Bodinat

Quiconque lira avec quelque attention les ouvrages de Baudouin de Bodinat devra constater que l’on y trouve des explications très cohérentes à tout un ensemble d’interrogations prégnantes sur le monde où nous vivons et que la sphère des « savants » et des médiatiques préfèrent maintenir dans le flou et l’informulé. Il faut dire que ses explications sur l’état de ces choses qui nous concernent directement ne sont souvent pas agréables à entendre. Il est en effet bien difficile d’admettre une vérité mettant directement en cause l’idée que nous faisons de nous-mêmes, de notre liberté de penser et d’agir; difficile d’admettre que nous sommes les dupes d’un système de domination qui a su si bien disparaître pour mieux régner.
Jusqu’à envahir notre conscience de la nature de ce qui nous environne, à nous faire voir dans la pire artificialité un ordre « naturel ».
Oui, d’autant que nous sommes devenus très susceptibles envers tout ce qui peut mettre en cause nos personnalités, nos petites constructions identitaires. Alors qu’il est si facile d’ignorer un importun : un grognon, un empêcheur de tourner un rond, un dépressif, un pessimiste, un complotiste même (désignation contemporaine très utile dès qu’il s’agit de déconsidérer une critique quelconque) – bref, un casse-pieds. Comme si les choses n’étaient déjà pas si difficiles ….

– « Le Petit-bourgeois gentilhomme » de Alain Accardo

Le système capitaliste ne fonctionne pas seulement par l’exploitation, la spoliation et l’oppression du plus grand nombre mais aussi par l’adhésion de la plupart au système qui les exploite, les spolie et les opprime, c’est à dire qu’il fonctionne à l’aliénation psychologique et morale, entretenue par des espérances de succès individuel et d’accomplissement personnel, le plus souvent fallacieuses.

Si naguère on a pu parler d’ »école libératrice », il faudrait plutôt parler aujourd’hui d’ »école conservatrice » tant son souci, explicitement partagé par les familles et le corps enseignant, est « d’adapter » aussi étroitement que possible les jeunes à l’ordre existant.

– « L’éclipse du savoir » de Lindsay Waters

Il n’est plus question que de forme, jamais de contenu. Voici la racine du problème de ce désastre écologique qui frappe l’université.

Y a-t-il un lien quelconque entre le marasme actuel de l’université et l’essor et la victoire de la révolution gestionnaire des trente dernières années ? Je pense que oui. L’une des questions qui me préoccupe le plus est celle de savoir pourquoi il y a une telle immobilité intellectuelle dans tant de disciplines du monde académique. Pourquoi le triomphe de la révolution gestionnaire nous a-t-il conduits à un moment à ce point réactionnaire au plan de la pensée ?

L’université et le libre usage de l’intelligence ne marchent pas bras dessus bras dessous, elles sont le plus souvent aux prises en une lutte à mort. Il y a quelque chose comme un amour des cloisons dans cette institution.

– « Sans objet » de Frank Fischbach

Que découvre en effet le salarié d’aujourd’hui, constamment interpelé comme sujet libre, et appelé à se montrer à tout moment comme le sujet autonome qu’il a à être, comme le sujet supposé capable de définir par lui-même ses objectifs et de conduire par lui-même ses projets ? Il découvre, le plus souvent dans l’échec, la douleur et la souffrance, qu’il ne possède aucun des moyens qui lui permettraient d’affirmer son autonomie, de conduire ses projets à leur terme et d’atteindre les objectifs fixés par lui-même […]. L’accès aux conditions et aux moyens objectifs qui lui permettraient [d’agir en sujet libre et autonome] lui est systématiquement soustrait et refusé.

Si le corps social est à ce point docile et soumis, c’est parce qu’il a été dépossédé de tout moyen lui permettant d’exercer une maîtrise et de déployer une puissance propre. Or cette dépossession des conditions de l’exercice d’une puissance propre est l’effet même des dispositifs en tant qu’ils produisent de la subjectivité : en tant qu’ils engendrent des processus de subjectivation, les dispositifs produisent des êtres qui sont sujets non pas seulement dans la mesure où ils sont assujettis, mais d’abord dans la mesure où ils sont des subjectivités abstraites, séparées, coupées des lieux, des milieux, des moyens et des conditions sans lesquels ils ne peuvent plus déployer aucune puissance d’agir propre, ni exercer aucune maîtrise active de leur propre vie.

– « La Nouvelle Raison du monde » de Pierre Dardot et Christian Laval

L’État est désormais tenu de se regarder lui-même comme une entreprise, tant dans son fonctionnement interne que dans sa relation aux autres États. Ainsi, l’État, auquel il revient de construire le marché, a en même temps à se construire selon les normes du marché.

Mieux vaut dire que le capitalisme s’est réorganisé sur de nouvelles bases dont le ressort est la mise en œuvre de la concurrence généralisée, y compris dans l’ordre de la subjectivité.

À la gouvernementalité néolibérale comme manière spécifique de conduire la conduite des autres, il faut donc opposer un double refus non moins spécifique : refus de se conduire vis-à-vis de soi-même comme entreprise de soi et refus de se conduire vis-à-vis des autres selon la norme de la concurrence. (…) L’invention de nouvelles formes de vie ne peut-être qu’une invention collective, due à la multiplication et à l’intensification des contre-conduites de coopération.

– « AccélérationUne critique sociale du temps » de Hartmut Rosa

La contrainte d’adaptation, en revanche, est une conséquence de la dynamique structurelle des sociétés de la modernité tardive et, plus spécifiquement, de l’accélération de la transformation sociale. La transformation accélérée, pas seulement des structures matérielles de l’environnement, mais aussi des modèles relationnels et des formes de lien social, des orientations de l’action, entraîne inévitablement chez les sujets le sentiment existentiel de se trouver sur une pente qui s’éboule. »

Mais rassurons-nous, ce n’est pas qu’un sentiment existentiel : elle s’éboule. 

– « Suburbia » de Bruce Bégout

La culture de la seconde moitié du XXe siècle est avant tout un enfant de la suburbia : elle a grandi dans son espace hétéroclite et bon marché, fait de centres commerciaux, de stations-service, de motels, de magasins discount, de zones géantes d’activité, de quartiers résidentiels, d’échangeurs d’autoroutes et de terrains vagues.

Ce qui domine la « sensibilité moderne » c’est l’hyperexcitabilité (…). Sous les spasmes, c’est l’asthénie qui règne.

– « Théorie du drone » de Grégoire Chamayou

Avec le drone armé, entre la gâchette sur laquelle on a le doigt et le canon d’où va sortir le projectile, ce sont des milliers de kilomètres qui s’intercalent. Cette mise à distance fait éclater la notion même de guerre: qu’est-ce qu’un combattant sans combat ? où est le champ de bataille ? et peut-on vraiment parler de guerre quand le risque n’est pas réciproque, quand des groupes humains entiers sont réduits à l’état de cibles potentielles – en attendant de devenir légitimes ?

– « La Santé mentale – Vers un bonheur sous contrôle » de Mathieu Bellahsen

Comprendre que la santé mentale s’insère dans une légitimation du discours de l’adaptation est important pour comprendre les enjeux : « La santé mentale est la capacité de s’adapter à une situation à laquelle on ne peut rien changer. » Que penser des personnes qui ne s’adaptent pas à une situation à laquelle elles ne peuvent rien changer, qui refusent de s’adapter, voire qui concourent à changer la situation ? Dans cette définition normative les révolutionnaires peuvent aisément être considérés comme porteurs de problème de santé mentale, disqualifiant par là les luttes sociales au profit d’une vision du monde réactionnaire et aseptisée.

En psychiatrie, l’importation du discours industriel et entrepreneurial entend résoudre les contradictions qui étreignent l’ensemble des acteurs du champ de la santé mentale et permettre à chacun de faire face à un cadre imposé. Ce cadre est celui de la mise en concurrence généralisée des États, des institutions, des services et des personnes avec tout ce que cela entraîne de contraintes douloureuses sur l’individu (patient ou soignant) et de solutions applicables pour tous.

« Les Mots sans les choses » de Éric Chauvier

Des mots calibrés sortent désormais des laboratoires de recherche pour être bradés au plus offrant des gouvernants : « éco-responsabilité, mixité, durabilité, ville-monde, planétaire, ville globale, ville diffuse, ethno-marketing, féminicide, care, ordre genré, justice environnementale » , liste non limitative.

Le capitalisme (en actes et en paroles) n’a pas seulement pénétré la place universitaire sur un plan économique. (…) Continuer à vendre l’invendable et l’inique sur un plan écologique, social, économique ou sur celui de la recherche n’est possible qu’en mobilisant une logique culturelle susceptible de rendre acceptable auprès des citoyens cet état des lieux que chacun, avec une acuité retrouvée, jugerait désastreux.

Telle est la version tardive du capitalisme, à laquelle les sciences humaines et sociales contribuent très largement. Il a suffi que de nouvelles compétences soient validées : que les étudiants se plient à un modèle de sciences sans négativité pour obtenir des financements; que les enseignants leur apprennent à breveter et à diviniser en conséquence.

Que l’on produise des connaissances en les imposant par le haut ou en récoltant des savoirs par le bas, voilà une question qui n’intéresse plus les chercheurs.

Il faut observer comment, en quelques décennies seulement, la conflictualité de classes est devenue inaudible, puis indicible. Le langage de la gouvernance nous pousse désormais à confondre un monde social sans tension et un monde social sans mots évoquant des tensions.

« La machine est ton seigneur et ton maître » de Jenny Chan, Xu Lizhi, Yang et Celia Izoard

La Chine, devenue en quelques décennies l’usine du monde, en se transformant en l’un des plus brutal capitalisme de la planète, et alors même que nous « consommons » chaque jour ses produits, demeure en grande part invisible aux néo-citoyens du monde occidental et comme s’ils n’étaient nullement concernés. Pourtant :

Chaque détail du quotidien de ces ouvriers de l’électronique rappelle l’extrême mesquinerie sur laquelle repose le grand capital : en particulier dans le secteur manufacturier, les petites économies font les grandes fortunes. Les réunions obligatoires de début et de fin de journée ne sont pas payées. Il est interdit de parler à son voisin de chaîne et de lever la tête. La nourriture est insipide et insuffisante. A l’usine Jabil de Wuxi, le recrutement est payant à chaque étape, y compris la visite médicale, et dans les dortoirs, l’eau potable n’est pas fournie. Sur tous ces sites, cancers, maladies respiratoires et neurologiques sont légion, résultats de l’exposition aux poussières d’aluminium, fluides de coupe et solvants.

– « Commun » de Pierre Dardot et Christian Laval

Cette norme de la concurrence ne naît pas spontanément en chacun de nous comme un produit naturel du cerveau, elle n’est pas biologique, elle est l’effet d’une politique délibérée. C’est avec l’aide très active de l’État que l’accumulation illimitée du capital commande de façon de plus en plus impérative et rapide la transformation des sociétés, des rapports sociaux et des subjectivités.

L’avenir semble interdit. Nous vivons cet étrange moment, désespérant et inquiétant, où rien ne parait possible. La cause n’en est pas mystérieuse, et elle tient non pas à quelque éternité du capitalisme, mais au fait que ce dernier ne trouve pas encore en face de lui les contreforces suffisantes. Le capitalisme continue de déployer son implacable logique lors même qu’il démontre chaque jour sa redoutable incapacité à apporter la moindre solution aux crises et aux désastres qu’il engendre.

Cette tragédie ne tient pas au fait que l’humanité ignore ce qui l’attend, elle tient à ce qu’elle est dominée par des groupes économiques, des classes sociales et des castes politiques qui, sans rien céder de leurs pouvoirs et de leurs privilèges, voudraient prolonger l’exercice de leur domination par l’entretien de la guerre économique, le chantage au chômage, la peur des étrangers.

– « L’Or du temps » de Michel Bounan

Le prédateur individualiste actuel, en élevant sa prééminence personnelle au-dessus du sujet universel qui en est la source vive, a détruit la planète et bientôt ses propres possibilités de survie.

– « Les Enfants du chaos » de Alain Bertho

La jeunesse est dans la ligne de mire de tous ceux qui veulent faire oublier qu’ils ont saccagé l’avenir.

La « ligne de mire » n’est d’ailleurs pas qu’une expression abstraite. Sur tous les continents, des jeunes meurent de ne pas avoir respecté avec assez de distance l’autorité de la police.

– «La Fabrique du musulman » de Nedjib Sidi Moussa

La fixation permanente sur les présumés musulmans, tantôt dépeints comme des menaces à l’ordre public ou des victimes du système – parfois les deux à la fois –, s’inscrit complètement dans le réagencement en cours de la société française. Car le vrai “grand remplacement” concerne celui de la figure de l’Arabe par celle du “Musulman”, de l’ouvrier immigré par le délinquant radicalisé, du “beur” engagé par le binational déchu. » En revenant sur les processus à l’œuvre depuis une quinzaine d’années, cet essai souligne le rôle des politiques, toutes tendances confondues, dans la propagation d’une fièvre identitaire qui brouille les clivages économiques et sociaux.

– « Pour en finir avec l’économie » de Serge Latouche et Anselm Jappe

La vie économique qui nous apparaît comme la base naturelle de toute vie humaine et le fondement de toute vie sociale existait-elle dans les sociétés précapitalistes ? L’objet même de la réflexion des économistes n’est-il pas plutôt une «trouvaille de l esprit», une invention, un imaginaire qui a désormais colonisé notre esprit et nos vies ? Si l’économie est une création historique finalement assez récente, comment fonctionnaient les sociétés pré-économiques ? Comment s’est inventée, au fil du temps, cette économie dans la pratique comme dans la réflexion ? Réfléchir à un futur différent pour notre société implique de penser l’impensable, de réaliser l’improbable, pour enfin selon le mot de Serge Latouche «sortir de l’économie». Un enjeu majeur pour notre avenir…

– « Tueries Forcenés et suicidaires à l’ère du capitalisme absolu » de Franco Berardi

Le terrorisme suicidaire frappe aujourd’hui aussi bien à Columbine ou Utoya, que dans les rues de Paris. Sa violence multiforme surgit de partout et repousse chaque fois les frontières de l’horreur. Soutenir que les assassins sont des forcenés ou encore des soldats fous d’une armée ennemie ne suffit plus à comprendre un phénomène aussi effarant. Franco Beradi s’intéresse ici à la psychopathologie, mais aussi aux origines économiques et politiques de ces meurtres de masse de plus en plus fréquents. Il démêle minutieusement l’enchevêtrement de désespoir, de ressentiment, de nihilisme, d’affirmation identitaire et de quête de célébrité qui pousse ces hommes à faucher la vie des autres avant de mettre fin à la leur. En ressort cet examen d’un corps social déchiqueté par le pouvoir absolu du capitalisme, pouvoir qui nous confinent à une impasse, entre dépression et violence.

– « Frères migrants » de Patrick Chamoiseau

Les migrants, les migrations en général, sont la réalité critique incontournable de ce monde, le nôtre, tel qu’il s’est construit avec la prise de pouvoir de la domination marchande sur la quasi totalité de son organisation. La légitimité des migrations, qu’elles soient consécutives aux guerres ou aux oppressions de toutes sortes (économiques et sociales), aux dégradations climatiques, est absolue. Vouloir rejeter les migrants, c’est rejeter le monde, c’est rejeter la vie. C’est aussi rejeter les conséquences de nos actes, de nos choix ou tout aussi bien de notre passivité; c’est rejeter l’histoire. Les migrants sont l’expression la plus visible de la nécessité du renversement d’une société régit par la logique marchande, par l’argent roi et l’égoïsme promu valeur dominante. Les migrants sont nos frères humains. La peur ne peut faire oublier que c’est juste un hasard que nous ne soyons pas à leur place. D’un coté il y a un devenir humain qui s’annonce difficile mais de l’autre, il n’y a que l’inhumanité, la barbarie et la honte.

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Bonjour,

Réfléchissons et expérimentons ensemble

Comment concevoir une Écologie Sociale dans les temps présents ?

Quelle est la situation de notre réalité humaine dans le monde contemporain ?

Comment dépasser cette paralysie qui est la notre ?

Quels sont les obstacles qu’il nous faut franchir pour nous reconnecter à une réalité humaine digne de ce nom ?

  • Rencontres de Cordes-sur-Ciel

    Organisé par le Réseau ESC le 11 et 12 mai 2024

  • Conférence-débat avec Floréal Romero

    Organisé par la Confédération paysanne du Gard, mardi 14 mai 2024, Nîmes, 18-20h

    Plus d’infos ici.

  • Conférence-débat avec Floréal Romero

    Organisé par Liège-Décroissance le jeudi 16 mai 2024, 18h30.

    Plus d’infos ici .