Carnet de citations : Inconscient et société

Le politique, abordé dans ses fins, ne se limite pas en effet à l’ars politicum, stratégies et exercices laissés à la discrétion du « prince », mais s’étend à l’ensemble des manifestations propres à l’organisation sociale. À ce titre, la psychanalyse s’avère politique, du fait de l’inscription du sujet et du sujet de l’inconscient dans l’espace de la polis et de ses configurations de pouvoir. (T. Ayouch)

Ce n’est pas l’homme qui a le « souci » mais le souci qui possède l’homme. (…) Le souci dévalorise le présent et se greffe sur l’avenir qui n’est pas encore. (…) l’individu soucieux ne vit pas dans le présent mais dans l’avenir, et comme il nie ce qui est et anticipe ce qui n’est pas encore, sa vie se déroule dans le vide, c’est à dire l’inauthentique, en oscillant entre une « résolution » aveugle et une « attente » résignée. (Karel Kosic)

La confiance, condition de l’agir, se métamorphose en défiance de tous envers tous et se cristallise ensuite en demande de « sécurité ». (Lazzarato)

L’existence humaine, cela va sans dire, consiste en la somme des relations sociales que les individus sont amenés à tisser dans la réalité du quotidien. Or, dans la mesure où elle distord l’une après l’autre toutes les relations qu’ils tentent de nouer, la focalisation exclusive sur ces formes d’extériorité modèle de façon inéluctable leur destin. (…) les façonne et les transforme pour en faire des êtres totalement étrangers à eux-mêmes. (Mita Minesuke)

Un des problèmes analytiques clés que l’écologie sociale et l’écologie mentale devraient affronter, c’est l’introjection du pouvoir répressif de la part des opprimés. Partout s’imposent des sortes de chapes neuroleptiques pour fuir précisément toute singularité intrusive. Il risque de ne plus y avoir d’histoire humaine sans une radicale reprise en main de l’humanité par elle-même. (Guattari)

Sur le plan des moyens de la pensée des populations contemporaines, la première cause de la décadence tient clairement au fait que tout discours montré dans le spectacle ne laisse aucune place à la réponse; et la logique ne s’était socialement formée que dans le dialogue. Mais aussi, quand s’est répandu le respect de ce qui parle dans le spectacle, qui est censé être important, riche, prestigieux, qui est l’autorité même, la tendance se répand aussi parmi les spectateurs de vouloir être aussi illogiques que le spectacle, pour afficher un reflet individuel de cette autorité. (Debord)

On ne peut sortir réellement de ce monde qu’en reconnaissant d’abord que nous y sommes et que nous y étouffons et ensuite en travaillant pratiquement à sa transformation. (Norbert Guterman)

On regrettera ici que la psychanalyse n’ait pas rompu, la plupart du temps avec cette tendance foncière de la psychologie à considérer les psychismes des individus comme autant d’îles fermées, impénétrables les unes aux autres, des sortes d’homo clausus. Au lieu de voir que nous faisons en réalité partie les uns des autres, toujours déjà tissés ensemble dans des relations d’interdépendances innombrables, qui ne sont pas seulement familiales. (Hervé Mazurel)

Il n’y a de libération que pour ceux qui se mettent intérieurement et extérieurement en état de sortir du capitalisme, qui cessent de jouer un rôle et commencent à être des humains. (Landauer)

On ne peut prétendre s’occuper de « l’aliénation mentale » sans s’occuper de « l’aliénation sociale », on ne peut prétendre soigner la psychose sans soigner l’institution et ses agents. A défaut d’une telle approche, il s’agit simplement « d’imposture », car l’aliénation sociale redouble et aggrave l’aliénation mentale. (Gabarron-Garcia)

On s’est demandé : « La vie privée est privée de quoi ? » Tout simplement de la vie, qui en est cruellement absente. Les gens sont aussi privés qu’il en est possible de communication ; et de réalisation d’eux-mêmes. Il faudrait dire : de faire leur propre histoire, personnellement. Si l’on considère que la vie quotidienne est à la frontière du secteur dominé et du secteur non dominé de la vie, donc le lieu de l’aléatoire, il faudrait parvenir à substituer au présent ghetto une frontière toujours en marche ; travailler en permanence à l’organisation de chances nouvelles. (Debord)

Tout ce qui est nié par la conscience, tout ce qui est délibérément omis, est partie intégrante de sa construction. (Siegfried Kracauer)

Un homme ne peut redevenir enfant, sous peine de tomber dans la puérilité. Mais ne prend-il pas plaisir à la naïveté de l’enfant et, ayant accédé à un niveau supérieur, ne doit-il pas aspirer lui-même à reproduire sa vérité ? (Marx)

Puisque chaque sentiment particulier n’est que la vie partielle, et non la vie tout entière, la vie brûle de se répandre à travers la diversité des sentiments, et ainsi de se retrouver dans cette somme de la diversité. Dans l’amour, le séparé existe encore, mais non plus comme séparé : comme uni, et le vivant rencontre le vivant. (Hegel)

La psychanalyse était à l’origine une théorie radicale, pénétrante et libératrice. Elle a peu à peu perdu ce caractère, elle est entré en stagnation, parce qu’elle n’a pas réussi à développer sa théorie face au changement de la situation humaine; au contraire, elle s’est retirée dans le conformisme et la recherche de la respectabilité. (…) Mais une telle intuition aurait exigé une critique radicale de la société dans laquelle ils vivaient, de ses normes et de ses principes manifestes et surtout cachés; il aurait fallu avoir le courage de trancher des liens réconfortants et protecteurs et de se trouver ainsi en minorité. Cela aurait demandé plus de psychanalystes, qui ne soient pas, eux-mêmes, pris dans la confusion psychologique et spirituelle d’une vie industrialisée et cybernétisée. (Fromm)

L’essentiel du processus analytique est déterminé par le choc et les longues répercussions qu’apporte la prise de connaissance des processus refoulés. C’est intentionnellement que je parle de prise de connaissance et non de connaissance, car ce qui est décrit ici c’est quelque chose d’autre et de plus profond qu’un simple savoir intellectuel. (Reik)

L’esprit ne conquiert sa vérité qu’en se trouvant lui-même dans l’absolu déchirement. (…) Il n’est cette puissance qu’en regardant le négatif en face, séjournant auprès de lui. (Hegel)


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